Do you see how the sky holds the sun ? - PV Clark

Voler est une sensation unique que Jon n’échangerait pour rien au monde. Il se souvient encore, plus vivement que pour tous ses autres pouvoirs, de la première fois qu’il a su l’utiliser. Il se souvient du vent dans ses cheveux, venant fouetter son visage. Il se souvient de cette sensation de flottement, alors qu’il n’était plus empêché de ses mouvements par la moindre sensation de gravité, lui qui jusqu’à présent n’avait jamais réussi qu’à bondir grâce à sa force surhumaine. Il se souvient, surtout, de cette sensation de liberté entière, si pure, qui l’avait habité en cet instant. Alors oui, bien sûr, il y avait eu des ratés. Il y avait eu cette fois où il n’avait pas écouté son père et pris son envol seul dans la nuit, se perdant dans l’obscurité inquiétante et où il n’avait pu trouver refuge que dans une grotte si sombre. Mais cela lui avait servi de leçon et, comme pour l’utilisation de tous ses autres pouvoirs, Jon s’était montré plus prudent par la suite. Quoi qu’il en soit, il avait toujours aimé voler, non pas forcément en supervitesse, mais prendre son temps. Naviguer au-dessus des nuages, ou même observer le monde si vivant en dessous de lui. Il avait aimé le faire, sur sa Terre d’origine. Et il avait repris cette habitude, ici, à Nowhere. Voler l’apaisait. Et il ne pouvait qu’espérer que cela soit la même chose pour lui.

Lui, c’était le Clark Kent d’un autre monde, le Superman d’une autre réalité, qui n’était pas son père à lui, mais qui lui ressemblait, selon les dire de Damian, comme un jumeau. Lui, c’était cet autre homme qui avait sauvé son propre monde de dangers tout aussi grands que ceux que son père avait dû affronter par le passé, de ce qu’il en savait. Ou en tout cas, de ce qu’il voulait en penser. Car si Damian ne lui avait presque rien raconté de la vie de cet autre Superman – probablement en partie parce qu’il en savait bien moins que ce qu’il voulait bien l’avouer, même s’il aimait à croire à Jon qu’il lui donnait simplement les informations au compte-goutte – le jeune super-héros ne pouvait voir cet autre homme comme mauvais. Même en ayant vécu sous le joug d’un Kal El maléfique, même en ayant été torturé des années par ce même homme, il se refusait de croire que celui qui était arrivé dans ce monde pouvait l’être. D’une part, parce qu’il était persuadé que malgré sa mésaventure dans une autre réalité, la majorité des doubles de son père ne pouvaient être que des hommes bons. D’autre part, parce que ce dernier avait réussi à gagner la confiance de Batman, de Bruce Wayne, à tel point que ce dernier avait accepté de l’héberger au sein de la Tour. Et si le père de Damian lui faisait confiance, Jon aussi, car il avait toute confiance en Batman. Son meilleur ami aurait sans doute qualifié cela de naïveté, voire même de stupidité, mais peu importait pour le jeune métis : il voulait faire confiance en cet autre Superman. Et il voulait le rencontrer, au moins une fois. Il n’était pas son père, mais peut-être pourraient-ils nouer un lien, malgré tout.

Parce que voilà la raison de sa balade dans le ciel aujourd’hui. Il avait remarqué que ce Superman passait beaucoup de temps dans les airs et, s’il s’était envolé ce matin-là, c’était bien pour tenter de le croiser. Profitant des rayons d’un soleil quelque peu différent du sien sur sa peau, absorbant comme toujours le maximum de force qu’il pouvait, Jon en profitait également pour scruter l’horizon, espérant l’apercevoir. Et puis soudain, il le voit. La seule autre silhouette présente dans cet horizon fait de bleu clair et de blanc, se découpant, tranchant, même, sur un ciel presque dégagé. Un costume pour parti semblable au sien, dans son bleu foncé et son rouge, mais pourtant si différent. Et ces traits si familiers, sur un pourtant parfait étranger. Un instant, le souffle lui manque, alors qu’il ressent comme une bouffée de bonheur le traverser. Pour autant, il prend le temps de le relâcher, lentement, calmement. Cet homme ne voudra peut-être rien à voir à faire avec lui. Mais au moins John aura-t-il essayé.

Levant les mains devant lui, paumes en avant, comme pour prouver sa bonne fois – alors même qu’ils savent tous deux qu’il n’a pas besoin de ses mains pour être dangereux – Jon s’approche un peu en prenant bien soin de se faire voir, pour ne pas le prendre par surprise. La distance à laquelle il s’arrête est plus que raisonnable, une fois de plus pour lui montrer qu’il n’a aucune intention hostile à son encontre. Et quand il prend la parole, il ne peut s’empêcher d’avoir ce sourire aux lèvres, qui s’entend jusque dans sa voix : « Bonjour, Kal El. Cela fait longtemps que je voulais faire votre connaissance. Je m’appelle Jon El. Et dans mon monde, l’on me connaît aussi sous le nom de Superman. »

Il y a tellement d’autres choses qu’il voudrait lui dire, tellement d’information qu’il voudrait lui donner, de questions à lui poser. Mais, pour autant, Jon préfère, une fois de plus, lui laisser le choix. En espérant simplement qu’il ne lui tourne pas purement et simplement le dos.

Se lever, enfiler son costume, décoller de la tour Wayne, surveiller la ville toute la journée et une partie de la nuit, rentrer avaler un truc à manger, se reposer quelques heures. Se lever, enfiler son costume, décoller la tour Wayne...les journées se suivent et se ressemblent depuis que Kal-El est dans ce nouveau monde et qu'il a trouvé un refuge grâce à Bruce, des journées qu'il passe à chercher une seule personne : sa femme. Même s'ils ne sont pas réellement mariés, ils auraient dû l'être mais après son retour d'entre les morts et l'affrontement avec Steppenwolf, il a eu besoin de se remettre un tant soit peu des événements et maintenant il a quotidiennement l'impression que c'est trop tard, qu'il ne pourra pas épouser l'amour de sa vie. Un abattement qui le prend tous les soirs, chaque fois qu'il cesse ses recherches et malgré le fait qu'il a pu apprendre qu'il y a encore des personnes qui arrivent fréquemment. Mais pour le moment, c'est la pleine journée et Kal-El ne déroge pas à ses nouvelles habitudes : il est dans le ciel de Nowhere à surveiller la ville, à écouter le moindre son, isolant l'un ou l'autre en fonction de ce qu'il peut entendre.

Par moments, il change de place, se mettant en vol stationnaire au dessus d'un quartier ou d'un autre, comme là alors que le kryptonien est revenu au dessus de Nexus, du coin de l'oeil il peut apercevoir la tour Wayne mais ce qu'il aperçoit rapidement c'est une silhouette en rouge et bleue qui est elle aussi dans les airs mais qui se rapproche de lui. Ce n'est pas la première fois qu'il peut l'entrapercevoir de cette manière mais il ne s'en ait jamais soucié, pourquoi l'aurait-il fait ? Il a vite compris qu'il n'est pas le seul dans ce monde à posséder des pouvoirs et tant que la personne ne s'en sert pas pour faire le mal, il en a strictement rien à faire. Sauf que là, visiblement, il ne va pas pouvoir l'ignorer bien longtemps alors que la silhouette se rapproche de lui, Kal-El terminant par se tourner vers la dite silhouette et l'espace d'un instant, d'un très bref instant il a l'impression de voir son reflet adolescent dans un miroir. Impression qui passe aussi rapidement qu'elle est venue alors que non, leurs traits sont trop différents pour ça, de quoi commencer à lui faire froncer les sourcils, avant même que l'autre n'approche encore puis ne lève les mains en signe de paix avant de lui parler.

Ainsi l'autre sait comment il s'appelle mais de quelle manière l'a t-il appris ? Hum. "Qui vous a dit comment je me nomme ? Batman peut-être ?" Parce que c'est bien le style du chevalier noir, de fournir une réponse tout en protégeant son identité pour ne pas dire leurs identités à tous les deux. Sans compter sur le fait que dans ce monde, il n'y a que Bruce qui connaisse son prénom kryptonien. Jon-El ? Hmpf alors ce n'est peut-être pas Bruce après tout qui a pu lui en parler et surtout cela signifie que ce jeune homme a un lien de parenté avec lui d'une manière ou d'une autre. Superman dans son monde ? Donc il vient d'un monde encore différent du sien, le même que Bruce ou encore un autre ? C'est ça le multivers, c'est rapidement le bordel. Kal-El ne dit rien de plus sur l'instant, les traits fermés, il réfléchit tout en bougeant de sa position tournant légèrement autour du jeune homme comme si cela allait pouvoir lui apporter une réponse. Pourtant, il ne lui faut que deux ou trois secondes pour accomplir tout ça avant de reprendre la parole, si bien que la plupart des personnes ne peuvent pas se douter de ses questionnements intérieurs. "Vous êtes une version plus jeune de moi-même ?" Parce que c'est une possibilité l'air de rien sauf qu'en le disant à voix haute, cela le fait tiquer. "Ou alors vous êtes le fils du Kal-El de votre monde ?" Il ne sait pas vraiment pourquoi mais cela sonne plus juste à ses oreilles, un petit détail qui lui reviendra sans doute d'ici une ou deux secondes puisque le kryptonien a une mémoire parfaite mais qu'il n'est pas à l'abri d'une défaillance, comme là alors qu'il est plus que surpris de cette rencontre même s'il n'en montre rien.

Jon ne peut s’empêcher de le ressentir, ce pincement au cœur auquel pourtant il s’attendait. Car si l’homme qu’il a en face de lui partage exactement les mêmes traits que son père, s’ils auraient pu sans problème être confondus l’un avec l’autre, il y a un indice qui ne trompe pas : aucun sourire qui en vient éclairer ce visage aux traits pourtant si familier lorsque l’autre le voit. Aucun signe de reconnaissance et encore moins de bonheur, de ce bonheur calme et pourtant entier qui a toujours prouvé, à ses yeux, tout l’amour que son père pouvait lui porter. Alors oui, Jon s’y attendait, bien sûr, d’autant plus que Damian l’avait prévenu. Il ne s’agit pas de son père, pas du Kal El de leur monde et il semblerait que lui n’ait jamais eu d’enfant. Mais, pour autant, cette indifférence que l’autre affiche à son égard laisse sur ses lèvres souriantes l’arrière-goût quelque peu désagréable de l’amertume. Parce qu’ils ne se connaissent pas. Même si Jon, au fond, ne demande que cela : apprendre à faire sa connaissance.

C’était bien pour cela qu’il était venu, qu’il avait fait en sorte de provoquer cette rencontre aujourd’hui. Et si l’expression de Jon s’est quelque peu ternie, l’espace des premières secondes de leur rencontre, elle redevient d’autant plus rayonnante dès lors que l’homme comprend qui il est réellement. Car il n’est rien d’autre, au fond, que son fil issu d’une autre dimension. Il était possible, bien sûr, que ce Superman ne puisse jamais le considérer ainsi, qu’il ne puisse jamais s’envisager comme un membre de sa famille. Pire, même, qu’ils ne puissent jamais tisser le lien, pas même celui d’un semblant de sympathie. Mais Jon ne le saurait jamais s’il n’essayait même pas. « C’est ça, oui ! Je suis le fils de Kal El, de Clark Kent, et de Loïs Lane, dans mon monde. Ils m’ont appelé Jon. » Tout à son enthousiasme, empli d’un réel mouvement de joie à voir que l’autre a si rapidement compris, Jon commence déjà à exposer des informations que la prudence aurait probablement voulu qu’il garde en partie pour lui dans un premier temps. Il a presque l’impression d’entendre la voix désapprobatrice de Damian le morigéner à ce propos, mais au fond, Jon n’en a cure. C’est son père, ou c’est tout comme. C’est Superman. Et Jon Kent ne saurait douter d’un Superman, quel qu’il soit.

Alors il reprend tout aussitôt, avec un sérieux qui contrasterait presque avec ses traits où se reflètent encore quelques expressions juvéniles, sous un sourire flamboyant : « J’ai repris la cape à la demande de mon père afin que la Terre ne reste jamais sans protection. Il a dû s’absenter, sans savoir quand il pourrait revenir. » Il n’y a aucune vantardise dans cette dernière phrase, pas même de la fausse modestie ; juste la conscience de Jon de son rôle, de sa place et de l’importance de la mission qui lui incombe. Et si, dans son monde, Jon aurait pu hésiter à lui transmettre cette information, trop peu sûr de ne pas perturber le futur de cet autre Kal El en la lui révélant, il n’a aucune raison de le faire maintenant. Car le phénomène qui les a conduits ici a totalement rebattu les cartes. Il n’est plus de futur ou de passé qui compte, désormais. Uniquement le moment présent. Et si Jon ne doit jamais revoir son véritable père, si celui-ci a disparu dans les limbes de ce qui les a amenés dans cette étrange Nowhere, au moins peut-il faire en sorte que la cohabitation avec cet homme qui lui ressemble tant se passe au mieux.

« Je ne cherche pas à vous déranger, ni à vous distraire, mais j’avais très envie d’apprendre à vous connaître, si cela vous convient. Après tout, nous sommes, à ma connaissance, les deux derniers à posséder ici de l’ADN Kryptonien. Cela nous fait déjà un point commun non négligeable. » Il est hors de question de s’avancer sur plus, de parler de liens de filiations, même si l’autre a déjà compris et que Jon, au fond, en meure d’envie. Mais leur lien kryptonien, lui, est indéniable.  Et comme il sait que sa naissance et son métissage ont pu aider à comprendre certaines particularités de son père, il se dit que, peut-être, cela pourrait intéresser son double. Leur permettre de passer du temps ensemble. C’est déjà presque plus que l’enfant au fond de lui ne saurait souhaiter. Avoir encore un peu de temps avec Clark Kent. Kal El. Avec celui qui est, et sera toujours, Superman.

Il est là le détail qui lui a échappé pendant un instant ! Il lui revient alors que l'expression du jeune homme en face de lui change lorsque Kal-El lui dit qu'il est le fils d'un autre lui. Le détail ? C'était furtive sensation qu'il a eu de se voir dans un miroir lorsqu'il s'est tourné vers lui couplé à ce léger reflet lui faisant penser à la femme de sa vie à l'instant même où la mine du jeune homme devient rayonnante. C'était tellement rapide cette sensation qu'il a pu avoir qu'elle a manqué de peu ne pas s'incruster dans sa mémoire mais là c'est limpide. Si limpide qu'il sait avant même que Jon ne prenne la parole ce qu'il va pouvoir lui répondre : il est bien son fils, leur fils. Pour autant le savoir n'empêche pas que la mention de Lois le sorte de son mode stoïque avec l'ombre d'un sourire sur les traits, l'ombre d'une impulsion en avant pour mieux retomber dans son stoïcisme et même pire la seconde d'après...parce que Lois n'est pas là avec lui, parce qu'il ne sait pas s'il va la retrouver un jour.

- Je la retrouve en vous.

Qu'il répond plus machinalement qu'autre chose tout à son emprise avec ses propres pensées. Avant que le jeune homme n'enchaîne pour lui expliquer pourquoi il peut être Superman chez lui, au moins cela répond à une des questions possible : Non son autre lui n'est pas mort. Enfin il ne l'était pas avant cet effondrement des univers puisque Kal-El se demande s'il serait possible qu'un de ses doubles ne débarque à son tour ou s'il y a une loi quantique, mystique ou autre du genre qui empêcherait qu'une telle chose n'arrive. Une loi qui voudrait qu'il n'y ait qu'un seul être similaire par univers.

- Comment ? Pourquoi ? Je ne me vois pas abandonner ma femme et encore moins mon enfant de cette manière !

Sa voix se faisant plus dure, rude alors que si jusque là, le kryptonien n'a pas émis une seule fois l'idée que l'autre puisse lui mentir, là il en va presque autrement. Jamais. Pour rien au monde il n'aurait pu abandonner Lois (sans parler d'un enfant même adolescent) de son plein gré, puisque forcément, il ne peut que penser à Doomsday et à sa mort, bref c'est tout simplement inconcevable. Il ne peut pas imaginer une telle chose et oui forcément, il a besoin d'une réponse ou de plusieurs selon comment les choses ont pu se passer. Il a réellement besoin de comprendre ! Cela n'empêchant pas le jeune homme de reprendre la parole, de lui parler d'autre chose, cela contraignant Kal-El à mettre de l'eau dans son vin et à adoucir son ton lorsqu'il termine par lui répondre après un hochement de tête positif.

- Je ne suis pas lui.

Ce n'est pas une menace, ce n'est pas un refus de faire sa connaissance mais une mise en garde, il n'est pas son père et ne le sera jamais au sens stricte du terme. Envisager de tisser un lien est possible, d'ailleurs son hochement de tête était là pour ça, pour lui dire que ce n'est pas un non. Cela serait plutôt un peut-être si c'est possible. Et puis peut-être que Kal-El commence à se sentir vraiment seul ici même avec un visage familier comme celui de Bruce mais justement c'est Bruce sans être le Bruce qu'il connaît. Sans oublier qu'il ne peut pas nier qu'effectivement ils sont les deux seuls avec du sang kryptonien dans leurs veines.

- Mais en effet de ce que j'en sais nous sommes les deux seuls à avoir de l'ADN kryptonien dans ce monde.

D'ailleurs cela peut entraîner bien des questions de sa part mais pour le moment Kal-El ne veut pas s'avancer plus avant tant que Jon ne lui aura pas répondu concernant son double et le pourquoi du comment il serait parti. Disons qu'il y a toujours un brin de méfiance de sa part.