Issue du Chaos originel [PV Hypnos]

Le brun est clairement extatique et dans son cas il s'avère que c'est l'antonyme de "paisible", aussi Hypnos se sent légèrement dépassé. Mais pas dans un mauvais sens, le Sommeil se laisse porter sur ces ondes percutantes et, plutôt, chavirantes. Il n'est pas loin d'être déjà énamouré. Il faut dire que c'est la discussion la plus longue et la plus intime eue depuis... longtemps. Le sentiment est bien sûr volatile, à peine formé comme un bourgeon, mais il est cotonneux et enthousiaste.
Son presque-ami est plus que vivant. Peut-être est-ce le fait d'expérimenter une forme de soulagement si vive qui rend la chose si agréable.
Il n'avait jamais eu à s'inquiéter pour quiconque car la Mort n'avait jamais été un problème. Il devait juste l'accueillir avec le meilleur sourire et peut-être, au fond, l'édulcorer. L'accueillir en amie. Est-ce pour ça que le Seigneur ne l'a jamais viré malgré ses manquements ? ... Ou peut-être est-ce le contraire, peut-être que sa fonction était suffisamment dispensable pour qu'on ne la lui retire pas. Peut-être qu'il fallait bien le mettre quelque part par égard envers Nyx? Non, non. Pourquoi penser comme ça, hein ?
Pour la première fois de sa vie, peut-être, il peut s'affirmer que son action a contribué à quelque chose d'important. (Son brun préféré a l'air satisfait de la qualité du service?)  
Cette âme ne voulait pas mourir et elle n'y parvenait pas. Une torture qui vrillait ses propres boyaux, d'urgence. Et maintenant, son presque-ami rit.
Qu'est-ce que son interlocuteur éprouve sous son hilarité ? Hypnos ressent un besoin fou de le comprendre.
Et il passe l'un de ses meilleurs moments, indépendamment de la violence hurlée (qui l'intrigue tout de même) par celui dont il n'a même pas songé à demander le nom - lorsqu'il constate cet oubli Hypnos en est parfaitement effaré. Comment peut-il être oublieux à ce point? Est-il gravement auto-centré?
Hypnos n'a pas le temps de rattraper la bévue que quelque chose de prodigieusement surprenant se produit : l'objet de ses pensée attrape sa main et lui adresse un bruit eh, plutôt charmant.
Ses paupières clignent plusieurs fois et les mots meurent en bouche, écarlate jusqu'à la trachée sûrement. Et ça ne vas pas en s'arrangeant. Que fait, que fait-il au juste?!
Jamais de sa vie millénaire qui-que-ce-soit n'a engagé un contact aussi... personnel. Le dieu gazouille une nuée anarchique de papillons, vocalise un nouveau hoquet, deviendrait presque liquide si l'autre homme ne le retenait pas fermement dans l'instant.
Sous ses doigts il ressent bien son... Cœur. La symbolique est jolie mais, surtout, c'est sa vie. Son presque-ami a l'air heureux de vivre - au moins de faire démonstration de sa vie. Lui est-il reconnaissant? A cette pensée, quelque chose l'engorge d'adrénaline et de vigueur.
Il comprend tout à coup comment des panthéons peuvent tomber dans l'excès.
Hypnos, avec suffisamment de gêne pour que ses lèvres en tremblent, ouvre sa paume pour mieux constater. Pour quoi d'autre, hein?
Lorsque la seconde main de son presque-ami vient épouser sa joue c'est une explosion si brutale que la machine met un instant à se relancer. Brûlant, puis glacé, puis brûlant. Ses pupilles se secouent à la négative, non pas pour sous-entendre un désagrément, mais parce que cela fait plus de contacts que ce qu'il n'en a jamais reçu. Il déglutit. Plusieurs fois.
Et il le regarde lorsque c'est demandé, presque craintif à l'idée de ne pas lui donner ce dont il a besoin.
Le regard de son presque-ami lui apparait toujours aussi joli. Habité et inanimé à la fois, comme s'il ne le regardait pas vraiment tout en le fixant furieusement - en le rabattant au sol et, sûrement, à sa hauteur comme s'il refusait de le laisser filer. Ah, ça fait quelque chose. Mais ça intimide sacrément.
De prime abord, la tirade sur la folie le laisse un peu coi et ensuite elle l'interpelle. Il voudrait contre-argumenter mais il n'en a pas le temps. Cela fait tambouriner quelque chose de plus contrasté dans son torse. Cet homme, s'il a bien suivi, a l'impression qu'il a une seconde chance... ça d'accord, mais il estime aussi... qu'il ne fallait pas la lui donner? Est-ce pour ça qu'il pense Hypnos fou? Tout cela a l'air très compliqué et auto-agressif...
Et peut-être agressif tout court. Les propos obscènes du brun lui paraissent légèrement... Trop dévots et dévoyés. Timidement, Hypnos le suit.
Bien sûr il le suit, il n'a aucune envie que ça dégénère en ville car ce serait sa faute. Et, aussi, il redoute de le voir disparaître au loin, pareil à un mirage.
Arrivé à sa hauteur, obligé de courir alors qu'il n'en a pas l'habitude et donc relativement bousculé, Hypnos tâtonne. Attends! J'ai beaucoup trop de choses à te dire et à te demander! Il me faudrait une liste si ça continue ahahah, enfin, bon. Comment tu t'appelles pour commencer? Qu'il demande en détournant le regard, honteux. Tu... me disais que tu comptais changer le cours de ta -nouvelle- vie, c'est ça? Et puis concernant tout le sacré... Tu sais je ne suis qu'un dieu mi-neur, pas grand chose à côté de mon jumeau - qui est littéralement la Mort incarnée. Ou en comparaison du Seigneur Hadès. Enfin, ce que je veux dire c'est que... Tu n'es pas un élu, désolé, j'ai juste ressenti que tu souffrais parce que tu te trouvais à proximité et puis... Ahah, tu vois, la Mort ne venait pas te prendre, ça m'a inquiété, je voulais... je voulais juste t'aider. Je n'ai pas d'élus, en fait, jamais de la vie. Personne ne me fait de prières non plus, je suis juste... Hypnos. Dit-il sans en être attristé, avec un sourire sur la fin, empressé et embarrassé. D'accord pour manger mais, uh, je ne suis pas ton frère il me semble? A moins que tu sois un des fils de Nyx! Il pouffe un léger rire, bien conscient que ça n'est pas très drôle. Et fais quand même attention à toi, tu es plus vif qu'un centaure là...

Oouhla. Qu'a t-il raté? Où a été son erreur? Son presque-ami avait l'air parfaitement enjoué et le voilà obombré sous un voile de latence crispée. Le bouclé penche la tête vers lui, pivotée de côté, afin de lui assurer son écoute timidement navrée - qui, admettons-le, est bien plus focalisée que d'ordinaire. Il se rend soudain compte, s'étonne de constater, que ses paupières ne sont pas lourdes comme la pierre et cela malgré l'afflux émotionnel qui ne cesse de changer son cap. Hypnos ne... S'ennuie pas.
Ce n'est pas aussi simple que de l'ennui, ce n'était en tout cas pas le désintérêt qui le faisait s'engourdir au point de feinter le travail. C'était plutôt la carence en stimulations car, à l'évidence, Hypnos en a besoin comme d'un carburant pour ne pas caler. Les tâches rébarbatives l'assommaient systématiquement et indépendamment de sa peur ou non des représailles. C'était sûrement pour ça et parce qu'il accordait une belle importance à quiconque n'était pas lui, qu'il embrassait n'importe quelle nouvelle rencontre - fusse t-elle vouée à n'être que de passage - avec grand enthousiasme.
Personne ne comprenait ça et pas même lui. Il était juste... irrémédiablement lui-même.
Ce presque-ami lui insuffle de la stimulation en intraveineuse, des bouffées d'effervescence et de tangibilité comme jamais auparavant... Parce qu'il lui parle et qu'il réagit avec une ferveur aussi intimidante que réelle, marquante. Parce que le brun donne de la consistance et prête du sens aux mots du bouclé. Il l'a même écouté concernant ses conseils beauté!
Parce que le Sommeil trouve ce mortel complexe et digne de nombreux intérêts.
Il lui est reconnaissant de lui rendre autant la réplique. Comme si quelqu'un de valeur en retournait à quelqu'un de plus banal.
Attendez, est-ce ça que le brun, en sa qualité de mortel, ressent?
Cocasse. Et étrangement un peu triste, non?
Hypnos n'est pas, parfaitement, candide. Il se rend bien compte que son interlocuteur est instable, sans savoir s'avancer sur le caractère ponctuel ou non de ce constat. Il a quand même eu le crâne, très, ouvert.
Il n'a pas vraiment peur lorsque le gel de son interlocuteur se transforme en rage bouillante et brouillonne - mais cela ne l'empêche pas d'être affecté comme il pouvait l'être durant les rages du Seigneur Hadès. Paradoxalement, Hypnos craint moins l'altération de son intégrité physique que d'altérer ses chances de susciter un bon sentiment. Il est, conséquemment, plus anxieux qu'autre chose et ses doigts qui déboulent les uns sous les autres, fautifs et rabattus contre son torse, en attestent.
Il veut vraiment comprendre ce qui se passe.
Il l'a prié? Ou était-ce Thanatos? Le Sommeil ou sa variante éternelle?
C'était Thanatos qui était attendu et le Sommeil qui est toujours arrivé. C'est ce qu'Hypnos comprend en passant, sans même y lui prêter attention, au-dessus de la forme du message. La compréhension le traverse comme une évidence pointue.
Il se met à secouer la tête à la négative, les émotions aussi balbutiantes qu'ouvertes. Une fine pellicule rougit la commissure de son œil, souligne son désaccord. Il ne veut pas "baiser" qui que ce soit, mais il n'est pas d'accord.
Cela reste bloqué quelques instants, faute de savoir trouver les mots. La proximité physique du brun ne l'y aide pas - sa rage, qui semble de plus en plus braquée en direction de la vie, ricoche contre les tremblements mitoyens du Sommeil.
Il n'a pas le pouvoir de lui donner un quelconque apaisement, pas vraiment, s'il l'endort Vaas finira toujours par se réveiller. Et dans tous les cas ils ne se sont jamais rencontrés avant, ce n'était pas lui, ils ne viennent sûrement même pas du même monde.
Et pourtant cet homme croit directement au divin? Existait-il aussi chez lui?
Ou alors... Peut-être s'agit-il bien d'un épisode passager? Liée au traumatisme récent?
Hypnos n'y croit qu'à moitié même si, d'ordinaire, il favorise toujours l'issue la moins coûteuse.
L'ouragan finit par retomber et Hypnos n'a rien dit, mais il a bouillonné tout le long, sans parvenir à anticiper ce qui sortirait de ses lèvres. Il n'était juste pas d'accord. Et c'est ce qui finit par sortir. En même temps, peut-être trop prêt à contenter et trop naturellement, il sort son téléphone portable et le lui tend.
Je suis désolé et en même temps même si c'est uhm, égoïste, je suis content que tu ne sois pas mort avant qu'on se rencontre. Merci de... d'être toujours vivant! Il sait que c'est bêtement dit. Il le déclame d'un seul souffle et, donc, sans avoir pris le temps de respirer ou de réfléchir. Il éprouvait un infini besoin de formuler quelque chose dans ce goût-là, pour lui garantir que sa vie représente quelque chose... Au moins selon lui et même si son opinion est sans doute dérisoire.
Il y a toujours, toujours ce "elle" comme une constante au milieu des sorties de piste de Vaas. Elle revient comme la ponctuation de sa détresse, dès que son humeur revire sur quelque chose de plus brutal. S'il a glissé de Thanatos vers elle est-ce parce qu'elle est... ...Ta sœur? Elle mettait des gens à genoux? Elle n'avait pas l'air facile à vivre... Je ne la connais pas mais je n'ai pas envie de la connaître, contrairement à toi. J'ai très envie d'être ton pote... "hermano". Un rire malaisé pour se donner contenance. Il file son idée première, sa confession de fortune, parce qu'il a l'impression que cette supposée sœur l'obsède et que toutes ces injures sont sûrement uh, une manière assez peu thérapeutique d'extérioriser une ou plusieurs frustrations?

Hypnos est, à l'évidence, trop stimulé pour correctement soupeser le pour du contre. La poigne moite de son "pote" est une donnée effroyablement difficile à traiter car elle condense énormément de stimulations. Proximité et intimité, camaraderie, sensation épidermique, adhésion et acceptation, volonté délibérée - autant qu'un crâne traumatisé puisse en produire - de le toucher lui, odeur herbacée. Ses joues brûlent en trahissant cette pression sous-cutanée et sa gorge est serrée.
Il y a bien sûr la gêne conviée par le geste en lui-même, mais il y a aussi les réponses de son corps qui n'a pas l'habitude d'être tripatouillé et la culpabilité de ne pas être bien calibré pour répondre de manière adéquate. Ses lèvres sont pincées.
Il aime le contact mais peut-être devrait-il le signifier ou, tout au contraire, serait-il en train de ne penser qu'à lui-même en ignorant l'instabilité de Vaas? Ou est-ce le bon sens qu'il omet de considérer? Than lui dirait sûrement qu'il est trop léger.
Qu'il n'aurait pas du trancher entre vie et mort à la place de l'ordre naturel des choses. Mais ça, il ne peut déjà pas l'entendre.
Sans qu'une crevasse ne menace de se former de sa glotte à ses viscères, refus paniqué. Il se retient de s'empoigner le visage entre ses mains qui, définitivement, souhaiteraient se raccorder à quelque chose - probablement au brun en premier chef, mais il ne peut pas se l'autoriser. Il entend trop de voix lui dire qu'il est idiot, qu'il est négligeant. Il ne les blâme pas!

Moi aussi j’ai envie d’être ton pote, Hermano. J’ai tellement envie d’être ton pote que je pense qu’on devrait vite apprendre à se connaître. C'est vraiment réel ? C'est vraiment si simple ?
Tout à coup, de la bouche de Vaas et autant collé à sa présence envahissante - dans le bon sens du terme!- qui restreint l'horizon du doute, tout a l'air parfaitement évident. Hypnos se synchronise sûrement un peu trop à sa présence et au rythme de son cœur qui palpite sur une cadence de tambours. Il pourrait s'endormir si le feu intérieur ne le faisait pas tressauter sur des charbons ardents, frotter ses pieds l'un contre l'autre tandis qu'il plane.
Enfin, là il ne plane plus que métaphoriquement puisque le brun l'a posé par terre avec un rien d'autorité. Hypnos lâche un rire validant et nerveux à la fois. Comme si tout à coup tout se jouait. Jamais personne n'a exprimé vouloir être son ami de manière aussi franche, sans laisser une bonne place à l'interprétation. Alors, il le regarde avec un brouillard d'émotions dans l'œil. Avec, aussi, une révérence tendre et redevable.
Alors, même s'il ne sait toujours pas pourquoi ni comment Vaas s'est trouvé enchaîné et la cervelle à l'air libre, il n'a ni le cœur ni l'idée bien fixée de lui refuser la visite de son modeste intérieur, ou même un repas. Hypnos, même pour un dieu et par les dieux, s'est souvent vu critiqué pour ses priorités. Mais elles sont irrémédiablement ce qu'elles sont. Sincères.
Aucune idée de ce qu'est un Bo Bun mais son interlocuteur disperse un enthousiasme communicatif qui le fait virevolter à sa suite et, franchement, il pourrait y passer l'intégralité de sa maigre cagnotte si cela pouvait susciter un autre élan de cette gaité - après tout Vaas est drastiquement fâché avec la vie.
Le Sommeil efface un bâillement du revers de sa main et pianote sur le portable récupéré, prend le plat étrange à son hôte et la même chose pour lui - aucun esprit d'initiative, certains le lui ont reproché.
Je n'habite pas très loin, suis-moi! Et heureusement, la commande est déjà en cours de préparation ahah. Il regarde son écran, se souvient tout à coup d'à quel point le brun a été crispé dessus, observe fixement le concerné durant quelques secondes.
Il a dramatiquement envie de faire quelque chose, depuis un moment. Alors il s'élance et c'est le cœur en apnée.
Il lui fait un énorme câlin, ses bras se nouant aux épaules transpirantes et poussiéreuses de sang avant de les relâcher. Et on fait bien de ne plus traîner ici, ceux qui t'ont fait ça pourraient revenir... Dit-il gentiment et en lui adressant un quart de sourire mielleux, sûrement pour lui signifier qu'il sait bien que danger il y a et que ça lui va. Lui dire où commence sa naïveté consentie : il a vraiment envie d'être son hermano. Suis-moi~ Sa main ondule comme une vague un rien flegmatique, chassez la fatigue elle revient en trémolo.
Arrivés à destination, Hypnos prend le soin de contourner l'entrée principale pour ne pas susciter la suspicion du gardien : les visites sont restreintes dans la résidence. Le Sommeil place un index sur ses lèvres porcelaine pour essayer, vœu pieux, de faire passer le message doucement.
Aussitôt la porte de sa studette ouverte, aussitôt refermée. Le bureau, nappé d'une couleur nacre pailletée sur toute sa longueur, est décoré d'étoiles peintes, d'un écran de taille correcte lui-même agrémenté de stickers fluorescents et à son pied trône une tour récupérée d'occasion. Des mobiles cosmiques pendent à la tringle à rideaux et des posters, aux teintes éthérées et aux objets minimalistes, habillent les murs. Les sanitaires constituent un bloc à l'entrée et sur le côté droit de la chambre, quelques rangements réhaussés par des peluches duveteuses, plus loin des plaques de cuisson sur pied violet, une bouilloire blanc cassé et surtout de nombreuses bougies d'ambiance.
Enfin, le cœur de la maison : le lit, dont la tête jouxte la cloison du coin douche, est matelassé de trois épaisseurs de couvertures pâles et de coussins dorés et argentés. L'un d'eux est un cœur au bleu pastel. Ledit lit doit être descendu du plafond et bloqué par une ferraille afin d'être maintenu au sol.
Hypnos est un peu embarrassé et se sent légèrement à l'étroit, mais il essaie de dévier le sujet. D'après le tracking, la commande est bientôt là...

Dans l'intimité de son repli, modeste mais douillet, Hypnos réalise des choses auxquelles il aurait dû songer avant. Vaas lui est, désespérément, sympathique et là n'est pas la nouvelle mais, peut-être, que cette affection - aussi subite que la mort, ahah - agit comme un paravent derrière lequel des précautions ont été jetées sous le tapis.
Il n'a pas peur de lui mais il a peur des conséquences et c'est souvent le cas avec Hypnos, ses craintes n'antagonisent pas. Il l'observe se véhiculer et toucher à chaque chose dans cet espace pourtant si restreint et c'est à se demander où le Sommeil lui-même doit se placer.
Il s'est d'ailleurs tassé, rapetissé, contre la porte d'entrée de son, pourtant, logis.
Avec le besoin grimpant de se carapater, si contraire à l'envie qui s'époumone en lui, celle - carencée en affection - de se nicher dans cette intimité étrange qu'il n'a jamais eue avec personne et pas même avec son frère ou sa mère.
Vaas le fait à sa manière, Hypnos ne juge jamais les pratiques, mais il s'intéresse à tous ces petits artéfacts qui ont du sens aux yeux du Sommeil. Mais, paradoxalement, celui-ci se sent délaissé au profit du cocon qu'il a ouvert à son invité - c'est une manière abstraite d'avoir peur de ne rien avoir à lui apporter si ce n'est quelques menus services.
Va t-il partir maintenant? Est-il en état de ne pas créer du grabuge en le faisant?
Comme un enfant il est presque fier de lui montrer sa chambre et voudrait la lui prêter le temps qu'il retrouve des rêves beaux. Mais, maintenant l'un sur l'autre, il se rend compte de ne pas savoir comment ou par quel bout commencer. Qu'il n'en est peut-être pas capable.
Vaas est vivant et c'est ce qui importe, mais il est encore instable. Et s'il... Causait des soucis dans la résidence, même très involontairement?
La crainte est ambivalente. Hypnos, dont l'enthousiasme bondit aisément, voudrait s'amuser avec Vaas de ce qu'il trouve fascinant dans cette petite boîte habitable, il rigole d'ailleurs nerveusement en l'attendant s'amuser - avec énormément d'éclat - de la chasse d'eau. N'en a-t-il jamais vu? Peut-être qu'il vient, lui aussi, d'un passé lointain. Il n'arrive pas à réfréner la question. Tu n'avais pas ça... Là d'où tu viens? J'ai eu du mal avec la technologie, au début mais... Ehh? Un petit hoquet de nervosité, nasillard, parce que la question le surprend. Il pensait que le brun suivait ses streams? Est-il assez embrumé pour l'avoir oublié? Ce n'est pas rassurant. Ou-Oui, je croyais que tu regardais mon contenu? Je streame et je fais quelques vidéos sur ma chaîne...
Il est soucieux de ce mortel, désespérément, mais il s'efforce de se placer un curseur, des limites, des jalons comme Thanatos l'aurait fait pour lui... S'il était là.
Il essaie de lui décocher un sourire confiant mais saute sur la première dérobade venue. Je reviens! S'exclame t-il si fort qu'il manque de faire tomber son appareil, dans le même sursaut il referme la porte derrière sa fuite en oubliant de la verrouiller.
Hypnos a le cœur battant, inspire et expire avec force, à tel point que le livreur lui demande s'il a besoin d'aide. Quelle sollicitude! Mais bien sûr... Qu'il en a sûrement besoin. Tout roule comme sur des roulettes ~ déclame t-il en s'assommant, un brin, lui-même. Il échange encore quelques banalités avant que le sac lui soit remis et il salue l'employé doué d'empathie - malgré son job qui nie tout humanisme, aliénant à souhait, il en a bien du courage.
Presque à reculons le Sommeil retourne vers sa chambre, victuailles en main.

Sa main voudrait bien rester vissée à la poignée, tant pis pour le sac de nourriture chaude qui fait le pendule à son avant-bras. Rien de superstitieux là-dedans et pourtant il brûle, étrangement, d'un mauvais pressentiment. Ses lèvres qui fleurent le baume douce camomille sont pourléchées par des passages d'incisives, ses jambes sont plutôt raides - comme son épaule qui se refuse à pivoter pour actionner l'ouverture. Vaas est-il encore là ?
Il a doublement peur de constater son absence. Parce qu'elle traduirait de sa non présence et, aussi, du fait qu'il est peut-être en vadrouille survoltée le Seigneur Hadès sait où.
Il n'aurait pas du le laisser seul aussi abruptement, pour la seule raison qu'il était cerné par ses insécurités. Ils doivent tous les deux savoir que la réception du repas au nom compliqué était une excuse opportuniste. Hypnos inspire une longue bouffée d'air, puis une seconde car la première n'a pas donné l'impulsion suffisante.
Et là surprise, puis stupeur. Il lui faut quelques instants pour pleinement - ou ne serait-ce que partiellement - appréhender la situation.
Les yeux langoureusement ombrageux de son presque-ami sont rayonnants dans le retour caméra.
Hypnos ce n'est, absolument, pas ce sur quoi tu devais t'arrêter. Pas une seconde. Son nez se retrousse.
Comment et surtout pourquoi Vaas a-t-il lancé son stream?
Le Sommeil remarque, en s'avançant de sorte à ne pas rentrer dans l'étroitesse du champ- avant d'avoir réfléchi, réfléchis! -, que le brun s'est savamment mis en scène. Les éclairages sont environ bien positionnés, en tout cas son regard y gagne de l'envergure et son maquillage accentue cette emphase, cependant les ombres sur son visage s'en voient creusées et son teint n'est absolument pas assez poudré. A l'écran, Vaas est animé d'un suave mordant, efficace si l'on vise le registre du vilain-catharsis, dangereusement sympathique. Hypnos se retient de glousser lorsqu'il le voit sourire avec cet air parfaitement sur la brèche, mais puissamment convaincu d'on-ne-sait-quoi. Voilà c'est exactement ce qu'il lui trouve! Quelle assurance il déploie en faisant tout et son contraire! Vaas n'a peur de rien et Hypnos s'avoue admirer ça.
Les troupes d'Arès écouteraient ce streamer-là avec ferveur. Et le Sommeil regarderait aussi. Sûrement avant de dormir pour se garantir un ou deux rêves.
Mais sa communauté doit se poser énormément de questions et, pire, il pourrait être retrouvé par ceux qui l'ont presque tué - et Hypnos avec. Enfin, il y a peu de risques vu l'ampleur du trafic sur sa chaîne...
Mais bon, si Vaas est encore sous le choc du traumatisme et qu'il n'agit pas en pleine conscience, peut-être qu'il n'aimerait pas voir cette image de lui plus tard - aussi classe soit-elle, dans le style charmeur-belliqueux, supplément provocation défensive.
Les pensées et l'admiration d'Hypnos se contredisent quelque peu et c'est, aussi, pour ça qu'il est resté planté dans le hors champ à se tortiller les doigts et les méninges - assez longtemps pour voir les premiers commentaires inquiets défiler à l'écran.
- Qui c'est ce type ? Où est Hypnos ?
- On doit appeler la police ?
Si ça continue le visage de Vaas sera massivement relayé et Hypnos, pour avoir fréquenté les réseaux sociaux plus que sa santé mentale le demandait, a déjà assisté à de sévères effets boule de neige.
Alors il décide d'intervenir. Après s'être retenu de glapir d'appréhension.
Salut salut les zozios nocturnes ~ bazarde t-il de sa voix la plus enjouée et en décalant légèrement l'objectif vers lui, afin que l'anonymat de Vaas soit à au moins... 3/6ème respecté. Dé-so-lé de t'avoir fait attendre chère audience! Gazouille t-il avec autant de conviction que s'il pouvait vraiment le faire, ou presque. Mon invité spécial a voulu vous faire une petite blague et, ahah c'est parfaitement normal, absolument tout l'est, aujourd'hui on vous propoose... Réfléchis, réfléchis Hypnos Le "Boyfriend does my Makeup Challenge"!! Comme ça on ne verra que les mains de Vaas n'est-ce pas?
Hypnos ne réalisera l'énormité du problème que plus tard.